Pourquoi vous devez absolument analyser vos parties et comment bien le faire par Julien Song ♟️ L’analyse détaillée de vos parties est un pilier incontournable de votre progression aux échecs. Il est souvent dit qu’une notion reste théorique tant qu’elle n’a pas été vécue concrètement. C’est le cas aux échecs : la puissance d’une paire de fous, par exemple, peut être étudiée dans les livres, mais vous ne saisirez réellement sa valeur qu’à travers l’expérience vécue lors de l’une de vos parties de compétition. Par ailleurs, votre jeu reflète votre personnalité et vos émotions, faisant de l’analyse de vos parties une démarche personnelle qui vous apportera des leçons plus marquantes que n’importe quelle leçon théorique. Pour une analyse qui porte ses fruits, il faut suivre ces 4 étapes essentielles : 1. Mettez à l’écrit les raisons pour lesquelles vous avez joué les coups que vous avez joué Lorsque je questionne mes élèves sur leur choix lors de la revue de leur partie et que la réponse est trop souvent « Je ne sais plus », cela m’empêche de fournir un diagnostic précis. Sans comprendre l’origine de la décision, il est alors difficile de proposer le bon remède pour améliorer leur jeu. C’est pour cela que vous devez noter les raisons qui vous ont poussé à jouer tel ou tel coup, car autrement, le jour de l’analyse vous les aurez oublié à coup sûr. 2. Analysez votre partie seul en premier lieu Beaucoup de joueurs font l’erreur de se précipiter vers une analyse par un entraîneur ou un logiciel. Mais le risque est de passer à côté d’enseignements qui pourraient être utiles, car ils se diront inconsciemment : “ Oui mais c’est dans le feu de l’action que j’ai commis cette erreur ! La prochaine fois, je ne ferai pas cette erreur ! “. Pourtant, très souvent, quand on analyse seul à tête reposée, on se rend compte qu’on commet à nouveau la même erreur. Lorsque c’est le cas, cela nous permet de comprendre qu’il y a vraiment ici un sujet à traiter, et qu’il ne s’agissait pas juste d’une erreur commise par précipitation. 3. Réalisez ensuite une seconde analyse avec l’aide d’un ordinateur ou d’un entraîneur Cette étape vous éclaire sur les meilleures voies que vous auriez pu prendre. Fort des réflexions personnelles de la première analyse, vous serez à même de mesurer l’impact des conseils de l’ordinateur ou de l’entraîneur. Il est très probable que ces conseils résonnent davantage en vous grâce aux efforts que vous avez déjà fourni par vous-même au préalable. A l’inverse, si vous aviez cliqué directement sur le rapport de partie fournie par le logiciel dès la fin de votre partie, vous n’auriez eu que le rush de dopamine associée à la vue de votre “score de précision” et du nombre éventuel de “coups brillants” que vous auriez joué. 4. Mettez en place un programme d’entraînement adapté Il est crucial de répertorier les erreurs fréquentes dans vos parties et de reconnaître à l’inverse les points forts de votre jeu. Cela vous permettra, au fil du temps, d’identifier des schémas récurrents et de concevoir un plan d’entraînement personnalisé, axé sur les erreurs spécifiques de vos parties. Citation de la semaine « Je prétends que rien n’est aussi efficace pour encourager le développement de la force aux échecs qu’une analyse indépendante, tant des parties des grands joueurs que de vos propres parties. » Mikhail Botvinnik, Champion du Monde d’échecs de 1948 à 1957, de 1958 à 1960 et de 1961 à 1963. L’analyse indépendante que préconisait Mikhail Botvinnik constitue l’essence même de l’amélioration au jeu d’échecs. Sans les ressources technologiques d’aujourd’hui, Botvinnik a non seulement pratiqué cet art avec assiduité, mais a aussi partagé publiquement les analyses de ses parties, invitant ainsi les autres grand-maîtres à venir confronter ses conclusions. Cette tradition, initiée par ses publications, a façonné des générations de joueurs, et en premier lieu Garry Kasparov, l’un des meilleurs joueurs de tous les temps, et qui fut l’un des élèves de Botvinnik. En analysant de façon méticuleuse vos propres parties, vous vous inscrivez ainsi dans la lignée de l’approche de l’école Botvinnik ! On pourrait penser qu’à notre époque, ce n’est plus nécessaire de faire tant d’efforts grâce à l’émergence de l’ordinateur. Or, c’est justement pour cette raison, qu’il faut plus que jamais analyser par nous-mêmes. L’ordinateur est un excellent serviteur, mais un très mauvais maître et comme le rappelle le numéro 1 mondial, Magnus Carlsen : “Quand vous jouez en compétition, vous n’avez pas l’ordinateur pour vous aider !”. Alors autant s’y habituer dès l’entrainement ! Article proposé par Julien Song |